mercredi 23 septembre 2009

La Trinité d’après Augustin et Jean de la Croix. Positions de Willy Michel LIBAMBU Muaso et de Miguel Gutiérrez (1993)

Par Flavien Muzumanga Ma-Mumbimbi


En 1993[1], Michel Libambu avait écrit un article qui comparait la mystique de saint Augustin (354-430) et celle de saint Jean de la Croix (1542-1591)[2]. Dans cette étude il abordait également quelques aspects de la théologie trinitaire communs aux deux Docteurs. L’objectif de l’A. était de montrer la dépendance théologique et mystique de Jean de la Croix aux sources augustiniennes[3]. Libambu le fait voir en partant de la voie psychologique (âme image de la Trinité) ; du passage du monde sensible au spirituel tant dans l’ordre de la connaissance que du vécu mystique ; de la Trinité comme objet de la vision béatifique et de la contemplation de l’essence divine[4]. Sa plus grande insistance portera sur la théologie de l’amour. L’on connaît l’importance théologique d’Augustin à cet effet. Saint Jean de la Croix va prendre cette même option, affirme W.-M. Libambu. Dans le passage du sensible au spirituel, du connu et dicible à « l’inconnu et ineffable », le symbolisme de l’amour purifié conduit à la participation qui transforme ou mieux libère la mémoire, l’intelligence et la volonté de l’être humain créé à l’image de la Trinité. De là, dans son étude descriptive et comparative, Libambu montrera que chez les deux Docteurs précités, la recherche trinitaire est toujours question de l’amour de la justice[5].
Dans cet élan d’amour comme symbole de la participation par la personne humaine à la vie de la Trinité la rencontre va de la privation à la recherche comme conversion pour aboutir à l’accueil de Dieu. Michel Libambu dira que l’originalité de Jean de la Croix par rapport à Augustin tient au changement des sources. Autrement dit, c’est l’apport des sources orientales qui ouvre la pensée du mystique espagnol à son originalité. D’après l’A., Jean de la Croix s’éloigne aussi d’Augustin par son assomption de la symbolique du mariage[6] refusée par ce dernier en tant qu’image de la Trinité[7].
A notre avis, la troisième partie de cet article (p. 227-232) est la moins satisfaisante. D’abord, parce qu’au lieu de centrer son discours sur la Trinité comme finalité de l’être humain en voie de divinisation et même divinisé, l’A. retourne à la vision christologique du problème. En effet, l’A. ne parle de la liberté, de la libération, de la foi et de la sainteté qu’en rapport avec Jésus-Christ[8], réduisant ainsi les marges des deux premiers points de son étude[9]. On aurait pu attendre que citant la célèbre étude de Mulago (p. 227, note 25) sur le mariage traditionnel africain, il assumerait ses conclusions pour montrer comment ce mariage peut être et est de fait une source africaine tant pour la théologie trinitaire comme pour l’expérience mystique de l’amour focalisée sur la Trinité. Mais, il est sans dire que la recherche menée par l’A. est très importante au niveau de l’inculturation africaine. Elle nous montre que la dépendance aux sources occidentales ne condamne pas nécessairement les théologiens africains au manque d’originalité. L’originalité africaine tiendra, aussi, et à l’expérience vécu et à la formulation théologique de ce vécu[10]. Cette affirmation se vérifiera dans l’analyse qui sera faite sur sa thèse de doctorat en patristique.
Quant à Miguel Gutiérrez, prof. au Grand Séminaire de Murhesa (Bukavu) et au Scolasticat de Philosophie des Carmes en R.D. Congo, nous donne une interprétation du rapport qui existe entre la Trinité ad intra et ad extra. Ce rapport trinitaire est également vu en fonction de la plénitude de la personne humaine dans sa vie de communion eschatologique avec Dieu[11]. Cet article est très intéressant sur le plan méthodologique dans la mesure où l’A. y opère à la fois avec des ressources de l’herméneutique philosophique[12], de l’anthropologie structurale[13] et de la théologie[14]. Il a aussi à cœur le problème des sources de Jean de la Croix[15]. Dans toute cette démarche, M. Gutiérrez analyse deux actants unis par une alliance matrimoniale : le Christ et l’âme humaine[16]. Cette alliance entre les deux actants va de la personnalité corporative (Dieu Époux du peuple élu) à l’âme individuelle[17]. Le mariage spirituel élève la personne humaine à la condition de l’Époux divin, le Christ. Dans ce mariage, la différence entre les tribus de l’Époux et de l’épouse est la plus radicale qui puisse exister[18].
Dans la partie théologique de l’analyse du Cantique Spirituel de Jean de la Croix, Gutiérrez se montre bien informé sur les débats théologiques en cours : problème de la connaissance de Dieu par les créatures ; le débat sur l’analogie de l’être et celle de la foi[19] ; la connaissance de Dieu non seulement par la voie de la causalité efficiente, mais également par celle de la beauté (Dieu est beau)[20]. Il y a une vraie médiation du Fils dans la beauté que Dieu donne à ses créatures. L’A. prend aussi position dans le débat concernant la grâce et la nature. Il affirme que la nature existe toujours dans la présence ontologique de Dieu sans laquelle ladite nature retournerait au néant[21]. Mais, cette présence ontologique de Dieu n’est pas encore une présence d’amour : la grâce, ajoutera-t-il[22]. C’est dans cette relation d’amour de Dieu à l’âme humaine vice versa qu’il situera la position de Jean de la Croix : il est impossible de savoir avec certitude qui est ou n’est pas en état de grâce.
Gutiérrez affirmera enfin, l’existence d’une présence théologale dans les âmes qui obéit uniquement à une communication spéciale. La mettant en corrélation avec le personnalisme d’E. Mounier et de M. Buber, l’A. insistera sur la compréhension de la grâce comme une relation interpersonnelle et dialogale. Sa formulation succincte est la suivante : « Dieu m’écoute et il m’aime. Un dialogue d’amour peut s’établir entre Dieu et l’âme »[23]. Remarquons en passant que dans cette citation, l’initiative va de Dieu qui écoute et répond par son amour. C’est le contraire de la recherche acharnée de l’homme dans sa montée vers l’Époux. Dans la suite de son étude l’A. insistera souvent sur cette initiative inconditionnelle de Dieu qui se révèle ou se dévoile[24].
L’A. montrera également les limites des trois formes de présence de Dieu en la personne humaine en corrélation avec la théologie de la foi et de l’espérance. C’est dire qu’aucun être humain ne connaît Dieu de telle sorte qu’il perde la foi et l’espérance comme s’il serait déjà arrivé dans la vision béatifique. D’où la nécessité de baser sa foi dans l’autorité de Dieu[25]. Cohérent avec la première partie de son exposé, l’A. évite l’application de l’analogie de « Dieu objet » de notre pensée. C’est le subjectivisme qui prédomine chez lui ignorant, un peu trop, le personnalisme hypostatique ou ontologique[26].
L’analogie des objets interviendra dans le dialogue intersubjectif rompu à cause du péché originel. C’est la dialectique du péché et du salut symbolisé par deux arbres : le pommier et l’arbre de la Croix[27]. Cette symbolique implique aussi deux attitudes : le vain bavardage dans la place publique (pommier) et silence et la solitude (Croix). Toute son étude, qui jusque là, se mouvait autour des concepts de Dieu, Jésus-Christ et âme, va changer de niveau théologique dans la partie qui précède la conclusion. L’A. part de la divinisation de l’être humain dans le Christ glorifié pour aboutir à la communion eschatologique avec la Trinité ad intra[28]. Voici le texte :
La théologie parle toujours de la Trinité ad intra et de la Trinité ad extra. De nos jours la Trinité ad extra est appelée Trinité économique[29]. La Trinité ad intra est le mystère des trois personnes en un seul Dieu. La Trinité économique se dirige vers l’homme. C’est la Trinité pour nous, qui se montre à nous par la création, la rédemption, la force sacrificatrice de l’Esprit-Saint. En théologie il y avait une séparation totale entre la Trinité ad intra et la Trinité ad extra ou économique[30]. La première considérait la vie intime de Dieu et l’autre la relation au monde[31]. Saint Jean de la Croix apporte de la nouveauté. L’homme divinisé entre dans la vie intime de Dieu même[32]. Il participe à l’amour du Père et du Fils. Il ne donne rien, mais il reçoit seulement. Il y a une analogie avec l’Esprit-Saint qui seulement reçoit et ne donne pas[33].
Cette citation veut montrer que le sommet du mariage spirituel est la communion eschatologique ou la divinisation de la personne humaine. Il y a une vraie et authentique participation de la personne humaine à la vie de Dieu qui est l’Amour. Mais, deux sont les problèmes que l’A. ne voit pas. D’abord, la Trinité économique ne s’achève pas avec la divinisation de l’être humain. Dans la vie après cette histoire-ci l’être humain divinisé ne vit pas sa plénitude à partir de Dieu est Dieu. Il demeure une personne humaine. Sa communication eschatologique avec les personnes divines est médiatisée par l’humanité glorifiée du Christ. Bref, la vision béatifique de l’être humain n’élimine pas le mystère apophatique et impénétrable de la Trinité ad intra. Même après la mort et la résurrection, la personne humaine demeurera dans la Trinité économique. Elle n’entrera jamais la Trinité ad intra qui n’est autre que le strictement spécifique aux/des hypostases divines.
Le deuxième problème, c’est le fait que Gutiérrez opère avec deux diagrammes : d’une part « l’amour du Père et du Fils » et d’autre part l’analogie de « la passivité de l’Esprit-Saint et celle de l’homme accompli qui ne donne rien et ne fait que recevoir »[34]. Ces deux diagrammes ne mettent pas assez l’accent sur l’égalité des personnes divines parce que l’Esprit-Saint est comparé, de manière exclusive, à l’être humain. En plus, l’être humain divinisé est, en plénitude, image de toutes les hypostases divines. L’on ne voit pas assez pour quel motif il ne serait comparé qu’avec la troisième personne de la Trinité. Enfin, ayant porté l’accent sur l’analogie de l’Esprit-Saint comme Amour qui unit le Père et le Fils réciproquement, l’on s’attendrait que l’A. marque l’accent sur le caractère dynamique de son action et de sa personne. Un amour passif serait-il encore capable de porter tout le poids anthropologique et théologique de l’Amour ? N’oublions pas que l’amour est une relation interpersonnelle intensive qui au niveau humain adulte implique l’intentionnalité explicite des pôles constitutifs de ladite relation.

[1] Comme nous venons de le voir, en cette même année, MAMPILA Mambu, L’œcuménisme et les enjeux de l’inculturation dans les groupes de prières, Facultés Catholiques de Kinshasa, 1993, p. 3-4 ; p. 14-16 et 46, parle aussi de la Trinité. Voici l’extrait des pages 3-4 : « Les groupes des prières sont des milieux où se pratique l’inculturation de la foi chrétienne. Il est prévisible que des erreurs ne pourront pas y manquer. Mais les plus graves et les plus difficiles à corriger seront celles des vérités centrales de la foi notamment celles qui concernent la Sainte Trinité, la nature et la mission de l’Église et, comme il faut s’y attendre, la personne de Marie, dont on tourne en dérision, refusant de saisir la relation organique qui existe entre les trois ministères : de Marie, de Jésus et de l’Église ». Ce qui est dit dans ces pages sera vérifié dans la théologie trinitaire de l’Église kimbanguiste (p. 14-16 et 46).
[2] LIBAMBU Muaso, M.-W., Le langage de l’expérience mystique. De l’inspiration augustinienne à l’originalité sanjuaniste, dans ZUAZUA, D. (éd), La mystique africaine, Kinshasa, Baobab, 1993, p. 217-232. Dans ce même livre, Edouard DIRVEN (Actualité de la ‘‘Vive Flamme d’amour’’, p. 283-300, p. 290s), parle des symboliques corporelles de la Trinité chez Jean de la Croix (main [Père], touche [Fils] et brûlure [Esprit-Saint]).
[3] Ibid., p. 215.
[4] Ibid., p. 218.
[5] Ibid., p. 218-220.
[6] Ibid., p. 227.
[7] Ibid., p. 226-227. Nous pensons que la comparaison n’est pas très heureuse dans la mesure où le texte d’Augustin cité par Libambu (De Trin. XII, VI, 6) ne concerne pas la relation « Dieu [Époux] et personne humaine [épouse] » exploitée par Jean de la Croix (C.S.B., I, 2). Le refus d’Augustin concerne la relation « Dieu [Père/Époux] de Dieu [Femme/Épouse = Esprit-Saint] » (De Trin. XII, V, 5). L’image traduite par le Cantique Spirituel est connue par Augustin sous la forme de « celui qui aime, ce qui est aimé et l’amour » (De Trin. IX, II, 2). C’est cette image qu’Augustin applique tant aux personnes humaines qu’à Dieu dans ses relations intradivines.
[8] Ibid., p. 228-230.
[9] Comp. avec AUGUSTIN, Serm. 103, 4 (Trinité modèle de l’unité de l’Église) ; Serm. 105, 3-4 (Trinité source de la solidarité/accueil dont parle Lc 11, 5-13). Cette théologie a été reprise dans cette citation des Evêques Basques « Confesser la Trinité n’est pas seulement la reconnaître comme un principe, mais aussi l’accepter comme modèle ultime de notre vie. Quand nous affirmons et respectons les différences et le pluralisme entre les hommes, nous confessons en pratique la distinction trinitaire des personnes. Quand nous éliminons les distances et travaillons pour l’égalité réelle entre l’homme et la femme, le riche et le pauvre, le proche et le lointain, nous affirmons avec nos œuvres l’égalité des personnes de la Trinité. Quand nous nous efforçons pour avoir ‘un seul cœur et une seule âme’ et nous savons ‘mettre tout en commun’ afin que personne ne manque de rien, nous sommes entrain de confesser l’unique Dieu et nous recevons en nous sa vie trinitaire », dans Creer hoy en el Dios de Jesucristo, San Sebastián, Idatz, 1986. Lire aussi, PIKAZA, X., Trinidad, dans Diccionario Teológico de la Vida Consagrada, Madrid, Publicaciones Claretianos, 1989, p. 1758-1778.
[10] Ibid., p. 223.
[11] GUTIERREZ, M., Le Cantique Spirituel : Analyse structurale et théologique, dans ZUAZUA, D. (éd), o. c., p. 267-281.
[12] Ibid., p. 264.
[13] Ibid., p. 266-268.
[14] Ibid., p. 269-281.
[15] Ibid., p. 267.
[16] Ibid., p. 265. Il s’agit ici de l’âme distincte de celle du Christ lui-même. Il n’est donc pas question ici des Noces du Logos avec l’humanité du Christ par et dans l’Incarnation.
[17] Ibid., p. 268.
[18] Ibidem. L’A. ne discute pas l’affirmation à partir du livre des Ac. 17, 28 qui affirme expressément que nous sommes de la race de Dieu. Ceci signifie qu’entre les tribus de l’Époux (Jésus-Christ) et celle de l’épouse (l’Église et l’humanité), il y aussi une forte similitude et même une égalité. L’Époux est notre frère, l’Aîné universel.
[19] Ibid., p. 270. C’est un thème très important en théologie de l’Inculturation. Il revient très souvent sous des formes variées : rapport entre la famille naturelle et la famille spirituelle ; la religion [traditionnelle] africaine et la religion révélée qu’est le christianisme, etc.
[20] Ibidem. Ces idées sont plus développées aux p. 276-278. Ici l’A. fait penser que l’originalité de Jean de la Croix tient à sa théologie de la beauté. On aurait beaucoup à dire à cet effet. Par exemple que le saint espagnol est dépendant de la théologie de la beauté d’Augustin et d’AMBROISE de Milan, De Noe et Arca, dans PL 14, 106, col. 409 ; 121, col. 414 ; De Paradiso liber unus, PL 14, 16, col. 281 ; In Epistolam B. Pauli ad Philippenses, dans PL 17, col. 409. En plus, les études actuelles sur la théologie « per viam pulchritudinis » redimensionnent les idées de Gutiérrez. Lire à titre d’exemple, LANGELLA, A. (éd.), Via pulchritudinis & Mariologia, Roma, Ed. Associazione Mariologica Interdisciplinare Italiana, 2003 ; VALENZIANO, C., ‘Il Simbolo Apostolico’ per viam pulchritudinis, dans GIORGIO, G., (éd.), o. c., p. 1-19 ; MILITELLO, C., Mariologia e « via pulchritudinis », dans Marianum 61 (1999), p. 459-487.
[21] Ibid., p. 271.
[22] Ibidem. N’oublions cependant pas qu’il n’y a pas de présence de Dieu sans son autocommunication réelle tel qu’il est (Karl Rahner).
[23] Ibid., p. 272.
[24] Ibidem.
[25] Ibid., p. 273.
[26] Lire à cet effet, SPITERIS, Y., La teologia ortodossa ‘riscopre’ il suo passato. La teologia dei Padri riproposta all’uomo di oggi, dans GIBELLINI, R., Prospettive teologiche, o.c., p. 275-307 ; CODA, P. – ŽÁK, L. (éd), Abitando la Trinità. Per un rinnovamento del’ontologia, Città Nuova, Roma, 1998; ID., La dottrina trinitaria ortodossa. Autori e prospettive, dans AMATO, A., Trinità in contesto, LAS, Roma, 1993, p. 45-69, p. 53-55; MUZUMANGA Ma-Mumbimbi, Fl., Fondement trinitaire des apparitions de la mère de Dieu. Étude systématique à partir de l’anthropologie africaine, dans EphMar 53 (2003), p. 241-282.
[27] Ibid., p. 274-275. L’on se souviendra ici de l’importance que recouvre la symbolique de l’arbre sacré dans la théologie narrative et systématique africaine. Au cœur de cette coïncidence, il faut noter la contextualisation symbolique que recouvre le choix de tel arbre ou tel autre lié intimement à l’écologie environnementale et sa sémiotique culturelle.
[28] Ibid., p. 280. Dans la conclusion p. 281, il dira ce qui suit : « Du point de vue théologique nous nous trouvons devant une âme qui désire trouver Dieu. Elle le cherche partout. Elle questionne les créatures, qui lui répondent. Mais la réponse ne la satisfait pas. C’est seulement dans la foi qu’elle pourra rencontrer son Dieu. L’époux l’interpelle. Lui aussi a une blessure d’amour. En passant par la chair-obscur des fiançailles spirituelles, elle arrive enfin au mariage. L’âme se livre totalement à Dieu et Dieu se donne à l’âme. C’est dans le Verbe incarné, le Christ, qu’elle embrasse Dieu. Le Christ est le Chemin qui la conduit à la vie intime de la Trinité. Elle est divinisée. Elle devient Dieu par participation. Voilà quelle est la grandeur de l’âme humaine ! ».
[29] Déjà le débat est brûlant au tour de l’économie de la Trinité à l’époque de TERTULLIEN, Adv. Prax. 2 ; 3 ; 8. Plus de détails dans MOINGT, J., Théologie Trinitaire de Tertullien, Paris, Aubier, 1966-1969 (4 volumes), ici volume III, p. 895 et 919.
[30] Cette critique faite au schéma de Thomas d’Aquin par K. Rahner est revue aujourd’hui à cause des apories provoquées par certaines théologies de l’identité stricte entre le mystère ad extra et ad intra. LADARIA, L. F., La Trinidad, misterio de comunión, Salamanca, Secretariado Trinitario, 2002, p. 11-64. L’affirmation selon laquelle “en théologie il y avait une séparation totale entre la Trinité ad intra et la Trinité ad extra’’ est à prendre avec réserve. En effet, en aucun manuel classique de théologie trinitaire on affirme l’existence de deux trinités, c’est-à-dire de six personnes divines. La distinction entre la vie ad intra et ad extra a toujours été méthodologique. Elle concerne notre mode de connaître le mystère fontal. Il s’agit donc de problème gnoséologique et non ontologique.
[31] Même dans la relation que la Trinité a avec nous, la transcendance divine n’est pas abolie.
[32] C’est une thèse déjà défendue par les pères. GREGOIRE DE NAZIANCE, Or. 7, 3 ; Ibid. 14, 23 ; ATHANASE, Oratio de Incarnatione Verbi, 54, 3 ; IRENEE DE LYON, Adv. Haer III, 19, 1 ; Ibid., 10, 2; AUGUSTIN, Serm. 185; BASILE, Sur le Saint Esprit, 9, 23. Partout, il est question de la divinisation de l’être humain qui en atteignant la plénitude de sa filiation devient « dieu ». Cette thèse de la divinisation des êtres humains est bien connue par la RA, comme nous le verrons avec l’analyse de l’étude d’AKENDA Kapumba, J.C., Inculturation comme orthopraxis chrétienne. Prolégomènes à une philosophie et une théologie de la culture, dans RAT 22 (1998), p. 181-214 ; MUZUMANGA Ma-Mumbimbi, F., L’Immaculée, p. 496-500.
[33] GUTIERREZ, M., Le Cantique…, p. 280.
[34] Cette affirmation est discutable. Dans sa vie dans la gloire auprès de Dieu l’être humain n’est pas que passif. En effet, il rend continuellement gloire à Dieu, puis il intercède pour les autres personnes en marche sur cette terre. MUZUMANGA Ma-Mumbimbi, F., Fondement trinitaire, p. 272-273.

mardi 8 septembre 2009

48- La Trinité enseignée au Congo Belge à travers la catéchèse du P. VANHERPE (1947)

Par Flavien Muzumanga Ma-Mumbimbi

L’exposé sur la présentation catéchétique du mystère de la Trinité par le Père Vanherpe[1] est d’une grande importance vu sa date de publication, en 1947. Nous sommes à l’époque où les idées du Père Tempels meuvent toute l’Église du Congo Belge. En plus, Vanherpe se trouve dans la même province que Tempels. Son apostolat se réalise dans la zone culturelle (luba du Katanga) étudiée par le fondateur de la philosophie africaine contemporaine. L’A. va-t-il recevoir ces idées ou les refuser ? Quelle est l’originalité de Vanherpe par rapport à la pensée de Tempels ?
Dès son point de départ, l’A. reconnaît n’avoir pas de compétence technique et mystique par rapport à la visée de son entreprise[2]. Cependant, il justifie son exposé catéchétique du mystère incompréhensible au fait qu’il se considère comme un instrument de la grâce dans la préparation des âmes à la foi[3]. Comme instrument de la grâce il dira « Je dois faire aimer la Très Sainte Trinité et faire entrer dans la pratique de la vie ce dogme fondamental de notre sainte religion. Comment trouverai-je des paroles de vie ? Si je n’aime pas ce mystère, si je n’en vis pas moi-même, mes enseignements sonneront creux : ‘aes sonans’ »[4].
Le public visé par Vanherpe dans sa leçon sur le catéchisme trinitaire est celui constitué par les enseignants. L’enfance n’est atteinte qu’en deuxième lieu. L’A. ne part pas d’un texte personnel. Il traduit le catéchisme de son vicariat qu’il transcrit en français[5]. Quatre questions structurent le catéchisme : 1. Y a-t-il un seul Dieu ?; 2. Comment s’appellent les trois personnes divines ?; 3. Ces trois personnes sont toutes Dieu, et toutes égales ?; 4. Ces trois personnes sont-elles un seul Dieu ? D’après l’A., « Ces quatre questions contiennent ce qu’on doit connaître du mystère de la Très Sainte Trinité […] »[6].
Pour répondre à la première question, Vanherpe part du Credo (Credo in unum Deum), de la révélation de Dieu à Moïse qui dira à tout son Peuple que Dieu est unique. De la révélation de l’Ancien Testament, il passe à la théologie des perfections divines excluant par là la possibilité de l’existence d’un polythéisme. Dans la présentation des perfections divines, l’A. se sert des analogies cosmiques : soleil qui totalise toute la lumière ; la mer qui réunirait toute l’eau. Après l’exclusion du panthéisme et donc l’affirmation de l’unicité divine, l’A. exploite la méditation sur le Pater[7]. Il affirme que l’unique Dieu prié par les enfants en Europe comme « Notre Père, qui êtes aux cieux » et le même que l’on prie en Afrique.
A la question de savoir « qui est une personne divine ? », Vanherpe part de l’analogie familiale « enfant – père – mère[8] », mais sans l’exploiter à fond dans la perspective de l’amour par exemple. Au contraire, il axera son enseignement sur les propriétés et les actions de l’être humain. Pour lui, est personne celui ou celle qui pose des actes et peut dire « moi »[9]. Cette réponse comporte trois éléments structuraux à noter : un sujet, l’activité qu’il pose et son autoconscience exprimée en terme de « Moi ».
De là, l’A. poursuit sa pensée en disant qu’en la Trinité, « Il y en a trois qui disent ‘Moi’. Il y a trois Personnes en Dieu »[10]. Cette formule ne veut pas dire qu’il y a trois actants mais un seul sujet (monosubjectivisme). Au contraire, l’auteur défend le tri-subjectivisme , c’est-à-dire que chaque actant est un ‘‘moi’’ distinct des deux autres, vice versa.
La révélation de l’existence des trois personnes en Dieu est attribuée à Dieu lui-même. C’est pour cette raison que l’Église croit et enseigne cette vérité. Vanherpe continue sa leçon en recourant à la liturgie de la messe où l’on chante trois fois Saint, pour honorer les trois personnes en Dieu[11]. Concernant les noms des trois personnes divines, l’A. se sert du signe de la croix pour l’approfondissement de son enseignement sur : Dieu le Père, Dieu le Fils, Dieu le Saint-Esprit. D’après Vanherpe chaque personne divine dit, selon son ordre, « Moi, je suis Dieu ». L’argument, comme on le voit, se base sur la conscience de soi que possède chaque personne divine comme base des distinctions en Dieu[12]. A la personne correspond la question « qui est ». La connaissance des différences en Dieu part du baptême de Jésus et de son mandat de baptiser le monde aux noms des trois[13]. L’égalité totale des trois personnes divines est exposée à partir de l’unicité de la doxologie ou de l’unique gloire que l’Église rend au Père, au Fils et à l’Esprit-Saint[14]. Elle est étayée par les articles du Credo[15]. Ces trois personnes sont toutes un seul Dieu. C’est là que réside la différence entre les personnes en Dieu et les personnes que sont les êtres humains[16]. Bref, le mystère absolu réside dans le fait que « trois moi soient un seul Dieu ».
L’explication de la nature au sens philosophique et théologique est rendue par l’idée de la finalité des choses et leur « manière d’être ». Une banane est pour manger. Telle est sa nature, affirme Vanherpe[17]. Au contraire, un caillou n’est pas faite pour être mangé[18]. Mais, la différenciation dans les natures devient patente dans le rapport qui existe entre l’animal et l’être humain. Leur différence est liée à l’intelligence humaine, à son âme immortelle, sa connaissance de Dieu et à sa prière envers lui[19]. La nature humaine se différencie de la nature divine parce que Dieu est Créateur, tandis que l’être humain est une créature.
C’est à la question de « Qu’est-ce cela ? » que répond la nature. Pour expliquer la nature spécifique de chaque personne humaine, Vanherpe se sert de l’anthropologie hylémorphique[20]. Chaque être humain a une âme et un corps différents des autres. Ceci signifie qu’il a une nature différente des autres êtres humains, même si cette nature leur est semblable[21]. Pour exprimer l’identité totale et unique de la nature (consubstantialité numérique) des trois personnes divines, l’A. se base sur la perfection, la sainteté et l’éternité divine[22]. Cette unicité de la nature divine implique l’unicité de l’action des trois personnes divines[23]. Les trois acteurs, sont trois sujets distincts, mais ils ne posent toujours qu’une seule action. Pour quelle raison ? L’auteur n’y répond pas.
La leçon du père Vanherpe ne porte pas d’indice d’effort d’assomption culturelle africaine parce qu’en fait elle vise ceux et celles qui récitent le bréviaire[24]. Il est sans dire que ces personnes ne peuvent être autres que des missionnaires occidentaux et des africains formés à la culture occidentale. L’on ne peut non plus se priver de constater que le concept de personne que cet auteur utilise diffère de celui du Catéchisme de 1624 (antu atatu). L’histoire du concept nous montre, en effet, qu’à partir du 17e siècle, personne acquiert la signification de « conscience de soi »[25]. C’est ce concept que Vanherpe utilise.
Cependant, la différence entre les deux documents marque aussi l’actualité de la leçon du père Vanherpe dans la théologie de notre temps. Vanherpe opère avec le concept de personne influencé par le subjectivisme dont l’autoconscience et l’auto-expression verbale sont les remparts inaltérables. Cette leçon nous abouche aux questions très actuelles en anthropologie systématique. Ces questions n’ont pas encore trouvées des réponses qui puissent recevoir un consensus universel au niveau de la théologie.
Avant de présenter ces questions, il convient de dire avec Jean Galot qu’il ne faut pas confondre le sujet et son activité consciente. L’autoconscience de soi est une activité du sujet[26]. D’où la question de savoir ce qu’est le ‘‘moi’’. Le ‘‘moi’’ est-il à identifier, strictement, avec l’âme rationnelle en l’être humain dont parle Chalcédoine[27] ? Est-il l’équivalent du « moi rationnel » ? L’identité entre le moi rationnel et la personne ne pose-t-elle pas des problèmes à la compréhension de l’unicité du sujet théologal en Jésus ? En effet, le Christ est un homme qui possède un vrai moi rationnel humain dépendant de son âme rationnelle humaine ? [28]
Le manque d’identité entre l’âme rationnelle et le ‘‘moi’’ montre que la ‘‘personne’’ est une réalité métaphysique qui ne se confond pas avec l’autoconscience de soi qui s’exprime par le ‘‘moi’’. La personne se situe à la racine ontologique du ‘‘moi’’ phénoménologique.
La leçon du père Vanherpe ne coïncide pas avec l’interprétation actuelle de la personne comme interrelation ou inter-personne. Dans l’actualité, l’on préfère dire qu’est personne celle ou celui qui est en relation avec d’autres personnes[29]. L’on insiste sur la qualité de cette relation arrivant même à identifier relation et amour, ce dernier entendu comme acte d’être et non seulement un mode d’être[30]. Cette définition nous approche vigoureusement, en fait, du concept trinitaire de la personne comme relation. Dans ce contexte de compréhension, nombreuses sont également les questions qui se posent en rapport avec la définition du sujet comme ‘‘moi’’. Dit autrement, la pluralité des ‘‘moi’’ en Dieu ad intra est-il relatif aux relations subsistantes entant que celles-ci sont des réalités relatives opposées et donc différenciées et qui différentient ? Le ‘‘moi’’ en Dieu est-il relatif à l’unicité numérique de l’essence divine ? L’unicité du ‘‘moi’’ en Dieu ad intra est-il à entendre comme une réalité dépendante de l’unité dans la relation constitutive des personnes ?
A ce niveau de l’étude la réponse à toutes ces questions complexes et difficiles, qui demandent un vaste traitement monographique, est encore à espérer. Mais l’on retiendra très brièvement que le concept de personne part de l’expérience humaine universelle que tout être humain fait de lui-même en rapport avec les autres[31]. Cependant, cette expérience outre le fait qu’elle connaît une médiation culturelle très particulière, elle est également fonction de la spécificité absolument unique de tout être humain. Et, enfin, au plan de sa thématisation philosophique, celle-ci est strictement dépendante d’une métaphysique très particulière parce que contextualisée. Ce point de vue est-il universellement partagé ? La réponse est négative, comme le démontre la position du Père jésuite E. Hocedez.
[1] VANHERPE, J., Ma leçon de catéchisme sur le Mystère de la Très Sainte Trinité, dans Revue du Clergé Africain (RCA) 2, 6 (1947), p. 454-464.
[2] Ibid., p. 454.
[3] Ibidem. Il est à noter que la considération de la personne humaine comme un instrument, même de Dieu, est vigoureusement rejetée par l’anthropologie théologique du XXe siècle. Cette dernière ayant assumé l’anthropologie de Luther (la personne précède ses œuvres et se constitue comme telle par sa foi), la philosophie de Kant (l’être humain est une fin en soi parce qu’il représente, sous une forme individuelle et inremplaçable l’espèce humaine), et les revendications des théologies féminines, elle n’admet plus la vision instrumentale de l’être humain. Bref, aujourd’hui l’on pense que l’anthropologie instrumentale est en opposition frontale avec l’identité de l’être humain entendue comme personne et donc sujet de liberté. Lire, WERBICK, J., Personne, dans EICHER, P. (dir.), Nouveau Dictionnaire de Théologie, Paris, Cerf, 19962, p. 720-726, p. 723 ; NEUFELD, K.H., La recezione di Kant nella teologia catolica, dans PIRILLO, N. (a cura di), Kant e la filosofia della religione, t. 2, Morcelliana, Brescia, 1996, p. 661-671 ; BOF, G., Kant e la teologia protestante del’900, dans PIRILLO, N. (a cura di), Ibid., p. 703-738 ; Lire aussi, O’COLLINS, G., La encarnación, p. 86.
[4] Ibidem.
[5] Ibid., p. 455. C’est bien dommage que nous n’ayons pas le texte original en langue africaine (Swahili). Il nous permettrait, comme dans le cas du Catéchisme de 1624, de voir l’effort d’adaptation au moins linguistique, dans l’enseignement de la Trinité. Nous savons que le texte qui a été traduit en français est celui du Catéchisme utilisé dans le vicariat de Baudouinville [ville de Moba, dans le Katanga] compréhensible, selon l’A., par les vieux qui l’entendent réciter et les enfants qui doivent l’apprendre (p. 464).
[6] Ibidem. Je souligne.
[7] Ibid., p. 456.
[8] Ibidem: « Dans votre famille vous [enfants] connaissez des personnes : votre père, votre mère… ».
[9] Ibidem. Vanherpe utilise, peut-être, ici le concept de personne dans le sens d’un sujet unique de conscience et d’autoconscience. En cela, il est dépendant de la conception de Descartes (1596-1650). Détails dans, TSHIAMALENGA Ntumba, L’a priori pragmatico-corporel en liturgie. Approche philosophico-théologique, dans CRA 20-21, 39-42 (1987), p. 49-66, p. 52-59. Lire aussi, O’COLLINS, G., La encarnación, p. 86. Mais, cette option qui identifie strictement « personne » avec le « sujet agissant et autoconscient », n’est pas sans discution en anthropologie et en théologie. En effet, la perte de l’autoconscience et de la capacité d’agir détruisent-elles l’être personnel d’un être humain ? Les enfants qui n’ont pas encore de conscience de soi, n’agissent pas et qui ne peuvent s’exprimer en terme de « moi », sont-ils pour cela des êtres pré-personnels, impersonnels ou non-personnels ? En Dieu, existe-t-il une seule et unique conscience (monosubjectivisme [position de K. Ranher]) ou trois centres de conscience (trisubjectivisme [position de Luis F. Ladaria ; Jean Galot ; José A. Sayés, etc. qui critiquent K. Rahner ]) ? Pour certains, la définition de la personne dans l’actualité n’a pas encore trouvée une solution satisfaisnte pour tous [Regina Radlbeck qui analyse et critique J. Moltmann et W. Kasper].
[10] VANHERPE, J., Ma leçon…, p. 457 ; Comp. SAYÉS, J. A., La Trinidad misterio de salvación, Madrid, Pelícano, 2000, p. 217 qui affirme qu’en la Trinité il y a trois « yoes (yo, au pluriel = moi) », trois sujets qui participent ( !) à la même nature divine sans la multiplier ni la diviser. A y voir de près, l’argument portant sur la compréhension de la personne comme sujet qui parle, ou qui est identifié dans un dialogue, est connu par Saint Justin, Apol. I, 36, 1.2 ; 37, 1.3.9; 38, 1; 49, 1; Tryph., 42, 3; 86, 6. D’après Andrea MILANO (o. c., p. 69-70), Origène, Hippolyte et Clément d’Alexandrie connaissent également cet usage qui obtiendra des significations vraiment trinitaires en Tertullien.
[11] Ibidem.
[12] Ibid., p. 458.
[13] Ibidem.
[14] Ibid., p. 458-459.
[15] Ibid., p. 459.
[16] Ibid., p. 460.
[17] NB : que cette définition de la nature (substance) peut s’étendre à la problématique de la théologie de l’inculturation de l’Eucharistie. En effet, la nature du pain, fabriqué avec n’importe quelle farine, est unique « être mangé ». Mais, cette unicité téléologique implique-t-elle l’autorisation de la célébration de l’Eucharistie avec d’autres pains différents de ceux faits avec la farine du blé ?
[18] Ibid., p. 460-461.
[19] Ibid., p. 461.
[20] Comp. LOBATO, A., Maria modello di donna: antropoanalisi della ‘‘Mulieris Dignitatem’’, dans TONIOLO, E. M., Come si manifesta in Maria la dignità della donna, Roma, Centro di Cultura Mariana ‘‘Madre della Chiesa’’, 1990, p. 124-156, p. 150-153.
[21] VANHERPE, J., Ma leçon…, p. 461-462. Dit d’une manière technique, tandis qu’en Dieu la nature des trois personnes divines a une identité stricte (homooúsios), les personnes humaines vivent dans une communauté de nature dont le fondement est la ressemblance (homoiousía).
[22] Ibid., p. 462.
[23] Ibid., p. 463.
[24] Ibid., p. 464.
[25] Lire LADARIA, L. F., La Trinidad, misterio de comunión, Salamanca, Secretariado Trinitario, 2002, p. 92.
[26] GALOT, J., Dieu en trois personnes, Saint-Maur, Parole et Silence, 1999, p. 41.
[27] DS, 301.
[28] O. COLLINS, G., La encarnación, p. 87, critique l’identification entre le ‘‘moi rationnel’’ avec la personne parce que celle-ci est contraire, affirme-t-il, aux enseignements de Chalcédoine.
[29] Ibidem.
[30] FORTE, B., La dimora nella Trinità: contribuito ad una ontologia Trinitaria, dans CODA, P. et ŽÁK, L’., Abitando la Trinità per un rinnovamento dell’ontologia, Roma, Città Nuova, 1998, p. 109-122, p. 117-118; dans le même livre, CODA, P., Sul concetto e il luogo di un’antropologia trinitaria, p. 123-135; RUPNIK, M.I., La visione dell’uomo a imagine del Dio-Trinità, p. 137-154; POLLANO,. G., Maria. Persona e grazia, Torino, Paoline, 2002, p. 18.
[31] GALOT, J., o.c., p. 41.

mardi 1 septembre 2009

La Trinité dans l’œuvre de KÄ MANA (2000)

Par Flavien Muzumanga Ma-Mumbimbi
Peut-être qu’une étude monographique sur le thème de la Trinité dans l’œuvre de Kä Mana pourrait se révéler surprenante à cause de ses nombreuses publications. Faute de cette étude et surtout d’une explicite mise en exergue de la question par l’A., nous ne nous limitons qu’à un de ses livres qui aborde directement la problématique[1]. Le théologien protestant aborde le mystère de la Trinité en prenant comme point de départ la « Théologie de la Vie ». Dans ladite théologie, l’univers théologal absolu auquel l’on est abouché est celui du « Dieu de nos racines, Seigneur de nos espérances »[2]. L’option de Kä Mana est de situer Dieu et au principe initial et au futur absolu de la vie africaine. C’est cette vision qui justifie son positionnement théologique.
Tout le champs que j’ai balisé depuis mon analyse des modèles missionnaires jusqu’à l’étude des thèmes et des quêtes inhérentes à l’idée d’une théologie de la vie dans la mémoire et dans la réalité des Églises africaines ne peut avoir un sens que par rapport au projet de Dieu pour le monde, au projet de Dieu pour la société africaine. C’est cette Vie-là [celle du projet de Dieu sur l’Afrique] qu’il nous importe de comprendre, si nous voulons être sûrs que nos quêtes théologiques et notre vision de l’avenir du christianisme en Afrique s’inscrivent dans le souffle de la révélation biblique. Qu’elles ne sont pas de simples projections de nos manques ou des purs produits de nos désirs humains, dans leur arrogance et leur vanité[3].
La préoccupation centrale de Kä Mana est la vie de Dieu pour nous[4], puis la réalisation de la part de Dieu lui-même de la promesse qu’il fait à l’Africain/e en vue de la construction d’une Afrique nouvelle. Kä Mana est conscient du fait qu’il n’est pas le premier à parler, en Afrique, de la théologie de la Vie. Il sait qu’il se situe donc dans une tradition. C’est au cœur de celle-ci qu’il tente de trouver « L’énergie fondamentale de la théologie de la vie dans la révélation biblique »[5]. Cette énergie fondamentale n’est pas un flux énergétique. En revanche, elle est le Dieu trinitaire comme fondement de la vie[6]. Nous citons un extrait de son texte qui explicite sa pensée. « Tel qu’Il se révèle dans les Écritures, le Dieu en qui nous croyons en tant que chrétiens est le Dieu créateur de la Vie[7]. Par sa parole, il a fait advenir tout ce qui est à l’existence : l’Univers, l’Homme, l’Histoire et la destinée de toute chose, selon une idée directrice et un projet dont il a révélé à l’être humain le sens total et la substance fondamentale en Jésus-Christ, sa Parole, sa Vérité ultime dont la puissance de Vie est à l’œuvre comme une force de novation : l’Esprit »[8].
Le texte cité fait une différence entre le Dieu créateur, c’est-à-dire, le Père, Jésus-Christ et l’Esprit-Saint. Jésus-Christ est appelé, Verbe et Vérité ultime de Dieu. Cependant, Kä Mana a une théologie de l’Esprit-Saint qui n’arrive pas à une vraie pneumatologie. En effet, l’Esprit-Saint n’est vu que comme dépendant de Jésus-Christ dont il est « la puissance de Vie » et « la force de novation »[9]. Rien n’est dit à ce niveau sur l’Esprit-Saint comme Vie qui donne la Vie et comme la Vérité qui conduit à la Vérité plénière.
Pour interpréter la catégorie essentielle de la Vie, Kä Mana harmonise son discours en rapport étroit avec la différence des hypostases divines. Il opte pour une structure trinitaire qui identifie le Père avec le don gratuit, la Bonté créatrice ; Jésus-Christ avec l’élan d’amour sauveur et l’Esprit-Saint comme puissance de novation et de sanctification.
- La Vie comme don gratuit, comme manifestation de Dieu en tant que Bonté créatrice, ce Dieu qui, dès le commencement, ordonne tout ce qui est comme quelque chose de bon, essentiellement. C’est-à-dire quelque chose émanant de lui-même, participant de son être profond : « Dieu vit que cela était bon », ne cesse de répéter le rédacteur du livre de la Genèse.
- La Vie comme élan d’un amour qui va jusqu’au bout de lui-même, dans le don de soi capable de sauver l’humanité et la création entière quand celles-ci sont coupées de la Bonté créatrice dont elles sont le signe et la manifestation, quand elles sont soumises aux logiques du Prince de la ruse et de la division : celui qui, par le mensonge, coupe l’humanité de Dieu, coupe chaque être humain de son prochain et coupe la société de son environnement naturel et de l’univers tout entier.
- La Vie comme puissance de novation, qui ouvre constamment des horizons nouveaux et des possibilités nouvelles à l’Homme et à la création ; qui n’enferme pas ce qui est dans la logique de la rupture avec Dieu, mais le sanctifie constamment, c’est-à-dire le remet à la hauteur de la Bonté et de l’Amour de Dieu dans son projet essentiel pour la création[10].
Dans l’extrait cité, l’A. ne parle pas explicitement du Père, du Fils et de l’Esprit-Saint. Deux possibilités s’imposent. La première consiste à interpréter tout son discours en disant que c’est toute la Trinité qui est impliquée dans les trois paragraphes. La deuxième possibilité est celle de dire que c’est chaque personne, différentiellement, que l’A. vise dans chaque paragraphe. C’est cette deuxième possibilité que nous adoptons à cause de l’analyse de l’extrait précédant où Kä Mana identifie le Père avec le Dieu créateur qui se révèle en son Fils et enfin l’Esprit comme force de novation radicale. Cette interprétation est aussi conforme au fait qu’il étaye sa pensée en se fondant sur « Les confessions de foi chrétiennes qui ont affirmé le caractère trinitaire de Dieu de la révélation biblique… »[11]. Il est à remarquer que l’A. parle du caractère trinitaire de Dieu et non de l’être trinitaire de Dieu. La différence est très grande et cela mérite d’être souligné. En fin, notre choix est celui de l’A. lui-même qui explicite le texte cité dans le contenu de son paragraphe intitulé « Dieu pour nous ou la dynamique de l’amour créateur »[12].
A la question de savoir ce qu’est la Vie, l’A. répond avec des expressions qui n’aboutissent pas à Dieu dans son ontologie apophatique. La définition que Kä Mana donne à la Vie, en majuscule, est manifestation, participation, don, etc. mais jamais l’identique à la Trinité ad intra. Pour s’en rendre compte voici cet extrait :
[…] elle [la Vie] est la manifestation de l’être même de Dieu. Dieu qui donne à l’homme la mesure de son être en le créant à sa ressemblance : comme être de bonté, d’amour et de novation. En l’installant au cœur de sa création où il doit se réaliser et s’accomplir comme bonté et comme amour.
La Vie, c’est donc essentiellement la Vie de Dieu, ‘comme les nuages sont les nuages du ciel’, dirons-nous en reprenant un philosophe célèbre[13].
C’est cette Vie-là qui se donne et se manifeste dans l’univers et dans l’humanité. Dieu en fixe l’être et la mesure en tant que création, c’est-à-dire comme quelque chose de lui-même à laquelle sa parole donne corps, quelque chose de son être comme bonté, comme amour et comme énergie régénératrice, novatrice et sanctificatrice.
Théologiquement parlant, Dieu est la mesure de la Vie. On ne peut avoir l’idée de la Vie qu’en se tournant vers Dieu et en saisissant son être même tel qu’il se manifeste : son être créateur [Père[14]], rédempteur [Fils[15]], sanctificateur et rénovateur [Esprit-Saint[16]].
Mais cet être n’est pas un être purement en-soi, ni un être exclusivement pour soi, il est essentiellement et fondamentalement un être-pour-nous. ‘Pour nous les hommes et pour notre salut’, déclare une confession de foi chrétienne[17].
Kä Mana ne se rend pas compte ici que le pour-nous de Dieu suppose et implique comme condition nécessaire de sa manifestation le Dieu qui est sa Vie ad intra c’est-à-dire la Trinité des hypostases. Dieu ne devient pas Trinité par et dans son pour nous. Pour ce motif, le pour-nous de Dieu ne donne pas de la pleine mesure de Dieu que comme Trinité dont la préexistence est Vie en plénitude. Il est vrai de dire que Dieu fixe l’être et la mesure de la Vie. Mais, il y a une Vie dont Dieu n’est pas la mesure et qu’il ne fixe pas l’être, car Il est cette Vie en tant que la Trinité. Il convient de rappeler une donnée connue. S’il est vrai de dire que « Dieu est la Vie », il n’en va pas de même pour l’affirmation selon laquelle la « vie est Dieu (= panthéisme) ». D’où la distinction nécessaire à faire entre la vie comme créature et Dieu comme Vie créatrice. Ce que l’A. ne voit pas bien c’est une réalité pourtant capitale : « l’être humain est différentiellement comme Dieu ; mais Dieu n’est pas comme l’être humain ». Il y a une absolue transcendance de Dieu dans son pour nous.
Kä Mana focalisant trop l’accent sur le pour nous de Dieu et son être avec-nous[18], semble ne pas bien souligner la transcendance de Dieu, car il met la créature et le Créateur dans le même cercle d’existants, cercle qui fait d’eux « la Vie même en tant que bonté essentielle »[19]. La Vie ne trouve pas seulement son authenticité en Dieu. En effet, la Trinité est l’absolue Vie authentique.
Kä Mana ne perçoit pas cette différence parce qu’il ne se rend pas compte du fait que les premiers dons de la Vie et ses réceptions différentielles se réalisent en Dieu lui-même en tant que tel, c’est-à-dire, Trinité des personnes. Il ne voit pas que même dans le pour nous de Dieu comme Trinité économique, il existe un abîme entre la Vie des hypostases divines entre-elles et leur inhabitation/communication aux êtres créés.
A notre avis, sa sotériologie renverse même le fondement de l’histoire du salut. De fait, au lieu que le « Dieu est Dieu » soit le fondement de l’histoire du salut, de sa liberté de se donner aux êtres créés, c’est le contraire que l’A. enseigne explicitement[20]. Ici l’A. ne perçoit pas que l’autocommunication rédemptrice de Dieu à la créature n’est pas la raison de son être de « Dieu est Dieu ». Il ne voit pas que l’expérience humaine de Dieu dans l’histoire comme missions divines a son fondement dans les processions intradivines.
Au niveau anthropologique, c’est-à-dire, celui des effets de la rédemption et de la réconciliation de l’être humain Kä Mana opte aussi pour une structure trinaire. L’être humain recouvre son identité créée à l’image des personnes divines. C’est sur cette base qu’il devient capable de se renouveler lui-même et de changer les réalités qui l’entourent. La théologie de l’Esprit-Saint va dans le sens herméneutique que l’A. a opté : celui de montrer que la Trinité est le mystère du salut qui se réalise dans l’histoire concrète d’un peuple.
Dieu est aussi ‘être-pour-nous’ en tant qu’Esprit sanctificateur et novateur. Par l’Esprit, le Paraclet qu’il nous donne en Jésus-Christ, il est l’agent des mutations, des transformations et des innovations par lesquelles le monde régénère ses puissances créatrices et se maintient à la hauteur des attentes spirituelles de Dieu pour nous. Pouvoir anti-désespoir, force anti-désespérance, l’Esprit travaille les individus et les sociétés pour qu’ils s’inventent toujours à nouveau à la lumière du projet de Vie en abondance et d’accomplissement plénier que Dieu a pour les êtres humains[21].
Ce qui est intéressant à noter à ce niveau, c’est la manière dont l’A. utilise le concept de Dieu. Dans la première phrase de la citation, tout semble indiquer que ‘‘Dieu’’ est identique à l’Esprit sanctificateur et novateur. En revanche, Dieu, remplacé par le pronom personnel « il » n’a plus la même signification dans la seconde phrase. Dieu devient ici l’identique absolu du Père. De fait, Kä Mana utilise avec fréquence « Dieu créateur ; Dieu ; Dieu-pour-nous »[22]. Il laisse de côté les concepts de Père/Mère, la première personne de la Trinité. Mais, l’A. ne justifie pas cette option qui rend le texte peu clair. Qui plus est, en aucun endroit la troisième personne de la Trinité est appelé Esprit-Saint. L’A. utilise plutôt le concept ambiguë d’« Esprit » oubliant que le Père, le Fils et même la nature divine sont aussi « Esprit ».
Une note très intéressante à signaler dans la théologie de la Vie que l’A. défend, est celle du passage de ladite Vie en une Personne. Le mouvement va de « l’Alliance de Vie[23] » à Jésus comme Alliance ou Dieu avec nous. Le texte mérite la peine d’être cité.
Quand l’alliance cesse d’être une Loi pour devenir Personne, il s’opère comme un changement de registre dans la compréhension même de la Vie. C’est la Vie elle-même qui devient une Personne et prend le visage d’une normativité concrète incarnée comme mesure de l’humain. En Jésus, cette normativité est don et sacrifice. Don dans le sens où désormais, en Christ, seul celui dont la vie enrichit l’existence des autres est Vivant. Sacrifice dans le sens où seul est vivant celui qui comprend le devoir existentiel de payer de soi-même et de sa vie si tel est le prix pour semer l’humain au cœur de la conscience d’une société ou d’un peuple[24].
Cet extrait montre, à suffisance, que l’A. n’envisage pas la Trinité ad intra, car pour lui la Vie ne devient Personne qu’en Jésus-Christ. Il ne s’agit nullement de la préexistence hypostatique de ladite Vie. Le concept de ‘‘Personne’’ que l’A. utilise ne coïncide en fait qu’avec le créé en Jésus, la proexistence du Fils de Dieu. Il ne s’agit que de sa personnalité ou de son humanité. L’A. ne voit pas que c’est parce que la Trinité ad intra est Vie que Jésus-Christ peut s’identifier avec cette Vie et que son don et son sacrifice sont capables du salut universel. La Vie en Jésus ne devient pas une Personne, car elle préexiste en tant telle, c’est-à-dire, Verbe-Fils du Père origine sans origine de toute vie et en union strictement numérique avec l’Esprit de Vie.
Il est aussi curieux de voir que l’A. ne parle pas de l’Esprit-Saint comme « Dieu avec nous (Jn 14, 16-17) », Don (Jn 3, 34 ; 7, 38-39), Feu du sacrifice éternel (Héb. 9, 12-14) et Vie source de vie (2 Cor. 3, 5-6 ; Jn 3, 5-6 ; 6, 63 ; Concile de Constantinople, DS 150). Ce manque pneumatologique constitue, à notre avis, une sorte d’amputation de la théologie de la Vie dans l’histoire du salut. Kä Mana qui identifie l’avec nous de Dieu avec l’alliance ne parle pourtant pas de Dieu ‘‘en nous’’, de son inhabitation comme Alliance. Et les Ecritures sont clairs à cet effet. Dieu n’est pas seulement avec nous, face à nous. Il est aussi intimement en nous. Il faut dire plus. Il existe une relation d’intime profondeur entre l’avec nous de Dieu et sa présence en nous[25], car le « face-à-face de Dieu avec l’être humain est un vis-à-vis d’intériorité à intériorité : le théologal se déploie en demeure de l’être humain et ce dernier comme la demeure de Dieu. Nous sommes en pleine relation d’infinie profondeur concentrique[26]. Dans ce contexte, la création continue n’est plus la projection de l’humain hors et devant Dieu, mais la reprise du créé continuellement dans l’identité de celui dont l’ontologie est absolument et parfaitement alliante ou Pungu. Dieu n’établit pas d’alliance/pacte externe à son ontologie [tri]personnelle. C’est lui même qui se donne comme l’Alliance »[27].
[1] KÄ MANA, La nouvelle évangélisation en Afrique, Paris et Yaoundé, édd. Karthala et Clé, 2000.
[2] Ibid., p. 181.
[3] Ibidem.
[4] Ibid. P. 183 : « Le ‘Pour-nous’ est une réalité vraiment capitale et décisive pour comprendre le Dieu de la révélation biblique ». Souligné dans le texte.
[5] Ibid., p. 182.
[6] Ibidem.
[7] Remarquez que la Vie, en majuscule, ne s’identifie pas avec Dieu ici. Il s’agit plutôt de la vie qui découle de l’acte créateur.
[8] Ibid., p. 182. L’A. distingue la “parole” par laquelle Dieu crée et Jésus-Christ comme sa Parole. Il reprend l’idée, à la même page, de cette façon : « Le lien que la théologie chrétienne a toujours établi entre la parole créatrice de Dieu, la destinée historique de Jésus-Christ et la puissance de l’Esprit constitue la grille de lecture la plus adéquate pour comprendre ce que le projet divin représente pour l’humanité ». Il n’est pas à redire que l’A. n’établit aucun lien d’identité entre la ‘‘parole créatrice’’ et la ‘‘Parole’’ de Dieu. Quant à nous, nous sommes de ceux/celles qui pensent que Dieu n’a qu’une seule Parole créatrice, parce qu’hypostatique, c’est-à-dire, son Verbe-Fils.
[9] Ibidem. Si on entend par le “puissance de Vie” la « Vie est Puissance » et la « Puissance est la Vie »; de même si la « la force de novation » signifie « la force est novation » et « la novation est force », alors l’on peut espérer s’aboucher à une vraie pneumatologie.
[10] Ibid., p. 182. “Quelque chose émanant’’ est à entendre ici au sens général « de provenant de » à cause de la précision faite par l’A. « participant » de son être profond.
[11] Ibid., p. 183. Nous soulignons.
[12] Ibid., p. 183-184.
[13] Cette citation est de très grande importance parce qu’elle montre que le génitif « la Vie de Dieu » marque une appartenance. Il n’y a pas d’identité entre Dieu et la Vie, de même qu’il n’y a en a pas entre le ciel et les nuages.
[14] Il développe l’idée à la p. 183.
[15] Le thème est exploité à la p. 184.
[16] L’argument détaillé se trouve à la p. 184.
[17] Ibid., p. 183.
[18] Ibid., p. 185-192, p. 185 : « Il faut tout de suite ajouter que le ‘pour-nous’ divin est profondément un ‘avec-nous’. Tel qu’Il se révèle comme réalité au cœur de la création et de l’histoire, le Dieu de la Bible, en son Fils et l’Esprit, crée désormais avec nous, il opère le salut des individus, de la société et de l’humanité avec nous, il rénove les esprits et les consciences avec nous, il renouvelle la face de la terre avec nous ». Ces affirmations sont vraies, mais pas complètes. Dieu, en son Verbe-Fils incarné et glorifié et dans l’Esprit-Saint ne se résout pas dans son avec nous tel que l’A. l’explique. Il y a une présence mystérieuse, un agir transcendant et une prévenante de Dieu qui ne répondent qu’à son être d’unique et absolu conducteur de l’histoire. La participation de l’être humain à l’œuvre de Dieu ne fait de lui l’égal de Dieu.
[19] Ibid., p. 183 : « En tant que Créateur, Il est Dieu-pour-nous : celui qui confie le jardin d’Éden, c’est-à-dire l’ensemble de l’environnement naturel disponible, comme lieu d’accomplissement, d’épanouissement, de bonheur et de responsabilité à l’humanité. Dans ce lieu de réalisation de l’humanité, Dieu, l’homme et le monde tiennent fermement ensemble. Ils sont la Vie même en tant que bonté essentielle, puissance d’une relation que le mensonge du Tentateur viendra briser pour précipiter l’homme dans un ordre d’existence où la Vie perd son authenticité en Dieu, pour plonger l’inauthentique, là où Dieu cesse d’être ‘pour nous’ comme projet de bonheur et d’accomplissement ».
[20] Ibid., p. 184 : « En tant que Rédempteur, c’est toujours ‘pour nous’ que Dieu est Dieu, qu’il devient homme, qu’il est Jésus-Christ, mort ‘pour nos péchés’, engagé dans l’histoire ‘pour nous les hommes et pour notre salut’ ».
[21] Ibidem.
[22] Nous parlons des pages 182-184.
[23] L’A. analyse l’alliance d’Éden (Ibid., p. 185.), de Noé (p. 186), avec Abraham-Moïse (p. 187-190).
[24] Ibid., p. 190.
[25] Détails, entre autres, dans GALOT, J., L’Esprit-Saint, personne de communion, Saint Maur, éd. Parole et Silence, 1997, p. 209-254. Spécialement, p. 212-214 Esprit-Saint comme Dieu « avec vous » ; aux pages 214-217 « Auprès de vous » ; Esprit-Saint Dieu « en vous » p. 217-220.
[26] LÓPEZ Quintás, A., El carácter relacional de la creatividad humana, dans EsTrin. 38 (2003), p. 411-428, p. 424-425.
[27] MUZUMANGA Ma-Mumbimbi, F., L’Immaculée Conception, p. 489-500.